Apple condamné à payer 634 millions de dollars à Masimo

par Yohann Poiron le 17/11/2025

Nouveau rebondissement dans l’interminable bataille entre Apple et Masimo. Un jury fédéral américain vient de condamner Apple à payer 634 millions de dollars au spécialiste médical, estimant que certaines fonctions de l’Apple Watch violent l’un de ses brevets sur la mesure de l’oxygène sanguin.

Selon Masimo, il s’agit d’un verdict « historique » qui confirme sa position dans ce feuilleton technologique qui dure depuis six ans.

Apple, évidemment, ne partage pas cette lecture. La firme a immédiatement annoncé son intention de faire appel et rappelle qu’une grande partie des brevets invoqués par Masimo ont déjà été invalidés. Selon elle, le seul brevet retenu dans cette affaire est expiré depuis 2022 et concerne une technologie médicale « d’un autre temps ».

Rappel : Apple avait déjà désactivé la fonction SpO₂ aux États-Unis

L’affaire fait écho au bras de fer qui a eu lieu début 2024, lorsque l’ITC (la Commission américaine du commerce international) avait imposé un blocage des importations des Apple Watch avec capteur SpO₂, jugeant que la technologie enfreignait bien les brevets de Masimo.

Pour éviter le retrait pur et simple des montres du marché, Apple avait préféré désactiver la mesure d’oxygène sur les Apple Watch Series 9, Series 10 et Ultra 2 vendues aux États-Unis.

Depuis, la marque tente de contourner juridiquement le problème en proposant une version « revisée » de la fonctionnalité. Et, c’est là que les choses se compliquent.

Le nouveau système : collecte sur la montre, analyse sur l’iPhone

Pour éviter tout risque d’infraction, Apple a choisi de modifier en profondeur l’architecture du capteur SpO₂. Dans l’ancien système, l’Apple Watch collectait les données, exécutait les calculs et affichait directement le taux d’oxygène sanguin sur son écran.

Dans la nouvelle version, la montre se contente de collecter les données, puis les transmet à un iPhone associé qui réalise les calculs et affiche le résultat dans l’app Santé, dans la section Respiratoire.

Apple considère que cette séparation technique suffit à ne plus tomber sous le coup du brevet de Masimo.

Mais l’ITC en a décidé autrement.

L’ITC rouvre le dossier : la version modifiée est-elle réellement différente ?

Vendredi, l’agence américaine a annoncé qu’elle ouvrirait un nouveau cycle d’auditions consacré à la version révisée du capteur. Elle estime que ce système n’avait pas été examiné dans l’enquête initiale et qu’il faut donc déterminer si la simple délégation des calculs à l’iPhone constitue réellement une innovation… ou un contournement juridique insuffisant.

Le point positif pour Apple, c’est que la modification avait été validée par les douanes américaines. Le point négatif, c’est que l’ITC n’est absolument pas tenue de suivre cet avis.

Pourquoi ce capteur est crucial ?

Le capteur SpO₂ de l’Apple Watch mesure la saturation en oxygène dans le sang. Un taux normal se situe entre 95 % et 100 %. Sous les 90 %, cela peut révéler un problème de santé sous-jacent.

C’est une fonction phare pour les utilisateurs orientés sport, santé ou sommeil, et son retrait serait un coup dur pour Apple.

Et maintenant ? Trois scénarios possibles

Si l’ITC juge que la version révisée enfreint encore le brevet, Apple n’aura pas beaucoup de marges de manœuvre :

  1. Désactiver une nouvelle fois la fonction SpO₂, au risque de mécontenter les utilisateurs américains.
  2. Concevoir encore une nouvelle version du système, en espérant éviter l’infraction.
  3. Signer un accord de licence avec Masimo, ce qui semble la solution la plus simple et la plus réaliste.

Beaucoup d’analystes partagent cet avis : payer Masimo une redevance garantirait le maintien de la fonction pour les utilisateurs, mettrait fin à un feuilleton juridique coûteux… et permettrait à Apple de tourner enfin la page.